INCARTADE
Du petit doigt des gnomes, enrouler la lumière et planter dans le cœur des tourbes le chemin des oscillations dérobées
Car le voleur des âmes ne cesse de fuir sous la pierre, d’enterrer l’humus et la semence
Je l’ai croisé à l’aube, aux prémices de la nuit
Quand, debout face au vide, il cisèle le fruit sacré pour l’offrir aux Dieux affamés
De son œil incandescent, sabrer le vent et écouter cet oiseau nomade raconter le livre du temps
Une savane incendiée ou une prairie tracée de sabots
Une dune dessinée par l’empreinte d’un chameau
L’ombre majestueuse du dernier lion
Carnassier indompté ou lévrier des fééries
Tu dors sous les étoiles et mesures ta destinée
Ces ruades dans l’insolence
Ce vernis des songes de l’évasion
Dentelle sculptée au visage du passé
Ride écrite sur le paysage des agonies
Jugement éphémère des pensées atrophiées
Pourrais-tu demander aux habitants des gouffres
La délivrance de leurs secrets ?
Où va la flèche imprimée sur ton front ?
Est-ce le sceau des esclaves révoltés ?
Scarification des apories
Corde tendue sur le désir des répétitions
Tu danses sur le cri
et épouses enfin ma lèvre
Écoute le roulement des soulèvements
quand il accompagne le geste à sa parole
qu’enfin il noue aux branches les lianes de la passion
Écoute ce grondement des marées
qui jettent aux péristyles l’explosion des sentiments
J’enserrerai ton poignet gauche pour le lisser en caresse
pour courir sur l’onde des lignes de ta main
et soupirer aux aveux l’ivresse de l’inconnu
J’ignore où fuit la vague
J’ignore où se creuse la dent des rivières
J’ignore la source de ce chant infini
L’automne portera sa graine
Immiscée dans le repli des tensions enfouies
J’entends le martèlement du cheval,
l’appel invisible de l’énigme
le psaume silencieux des épisodes inachevés
Page après page
ligne après ligne
poussière après poussière
Tu dessineras un pays
où les hommes seront des géants minuscules
où les feux brûleront nos tempes
pour une migraine fertile
ou une symphonie perturbée
Pour un roman pistil
Sous le charme d’une éclosion
Se souvenir des serres chaudes
des récits exaltés
de l’épidémie de liberté
Sur la pointe du stylet,
savourer la goutte irisée
quand ta veine bat au rythme des tambours mystérieux
Dans l’antre des fusions
nous forgerons l’acier
nous lacérerons le fer
nous briserons nos chaînes
30 octobre 2024 - JCD